Violence scolaire... droit de retrait ?

paru le lundi 21 février 2011

L’actualité du 93 tourne essentiellement autour de la violence scolaire, avec ce fameux droit de retrait exercé et revendiqué par les enseignants d’un lycée où a eu lieu une agression sur un élève.

On ne trouvera pas ici de réponse définitive sur la légitimité de ce droit de retrait. Une règle en matière hygiène et de sécurité est qu’on examine au cas par cas. Ce qui transparaît dans les médias ne peut se substituer à l’enquête immédiate prévue en la matière.

Quelques remarques toutefois sur ce cas :

Si l’administration n’a pas respectée elle-même la procédure prévue, elle aura bien du mal maintenant à contester le retrait.

Le texte dit : « Si un agent a un motif raisonnable de penser que sa situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé ou s’il constate une défectuosité dans les systèmes de protection [...] ». Si on peut éventuellement contester que la vie ou la santé soit menacées de façon imminente, l’absence de surveillants peut peut-être s’assimiler à une défectuosité dans les systèmes de protection.

Dans ce cas, parce que le texte dit : « L’autorité administrative ne peut demander à l’agent de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent. », tant que le système de protection (le nombre de surveillant) n’est pas remis en état, il n’y a aucune raison de forcer les personnels à reprendre le travail.

Sur l’élève comme menace ou danger...

Considérer les élèves comme une source de danger peut sembler curieux dans une école dont la mission est précisément de s’en occuper. C’est un discours sûrement très difficile à accepter d’un point de vue éthique, surtout avec une sensibilité humaniste.

Mais hélas, sans aller jusqu’à des jeunes armés, dans bien des établissements, des enseignants se sentent menacés dans leur santé , souvent mentale, par des élèves qu’ils n’arrivent pas à gérer. Pour preuve, les arrêts de maladies, les dépressions nerveuses, les enseignants qui prennent des médicaments pour tenir...

Dans de nombreux cas, les situations qui amènent ces manifestations devraient être vues comme des accidents de service. Parfois, un droit de retrait aurait probablement été justifié.

Pour illustrer tout cela, je voudrais relater ici le cas de cette collègue, enceinte, qui est redescendu un quart d’heure après le début de son cours avec une classe réputée impossible, en salle des profs en disant qu’elle préférait quitter sa classe que devenir folle. Les profs présents sont montés prendre la classe en charge et tout s’est arrêté là. Cependant, c’est bien là un droit de retrait que cette collègue avait observé sans le savoir. On peut aussi considérer qu’elle était victime d’un accident de service.

Il est bien trop facile de les renvoyer à leur soi-disant incompétence ou fragilité. De toutes les façons, la réglementation dit que l’employeur a l’obligation de les protéger puisque c’est lui qui les a mis dans cette situation. Sa responsabilité pénale est engagée.

De la même façon, il serait bien trop facile d’exclure tous les élèves posant problème. Ce serait contraire à l’obligation scolaire et un abandon de nos missions au sein de l’institution.

Le travail que doit faire l’école, notamment au sein des Comité d’Hygiène et de Sécurité, c’est de trouver des solutions permettant au travail de se poursuivre sans mettre les personnels en danger. On peut penser à
 de la formation
 des moyens en personnel
 des organisations du travail repensées

...mais une démarche de prévention ferait peut-être apparaître d’autres pistes.

Examiner les choses sous cette angle enclencherait un travail de prévention de nature à faire évoluer les conditions quotidiennes d’exercice du métier dans un sens favorable.

La FSU s’est engagée dans ce travail.

Eric Apffel