Introduction AG

Déjà beaucoup d’éléments dans cette réforme ont été analysés par le SNES à tous les étages, national, académique, départemental et nous mettrons en commun tout à l’heure les docs élaborés par les uns et les autres pour faire barrage à cette réforme qui au delà du lycée nous montre quel visage pourrait avoir l’école de demain si nous ne réussissons pas la mobilisation contre !
Aujourd’hui pour avoir travaillé sur les grilles horaires dans le dernier snes dijon et puisque nous avons des grilles reprises au niveau national et étendue à toutes les séries et tous les niveaux, je souhaiterais attaquer la réforme non par les grilles mais par ce qui est la vitrine du gouvernement pour faire passer la réforme, à savoir l’accompagnement perso et l’orientation.
Il me semble que c’est une argumentation à laquelle parents et lycéens ne peuvent pas être insensible !
Nous sommes dans l’urgence ! nous n’avons pas d’autre choix que de penser un discours extrêmement efficace et clair pour contrer la réforme. Il y a bien des angles d’attaque, j’en ai choisi deux aujourd’hui… mais j’ai envie de dire il y en a d’autres, dans cette réforme, tous les chemins mènent non pas à Rome mais à la catastrophe !

Le contexte de la réforme :

Cette réforme s’inscrit dans un contexte économique de restrictions budgétaires qui touchent toutes les administrations (police, justice, santé…)
Mais il ne s’agit pas seulement de faire des économie(un fonctionnaire sur deux non remplacé), il s’agit dans le même temps d’accroître la qualité des services rendus aux usagers. (LOLF)
Bref il faut faire mieux avec moins de personnels – Comment on va faire ? on va coller la pression aux gens en leur fixant des objectifs chiffrés et on entre dans la logique de la performance et dans « la culture de l’évaluation et du résultat »
Un exemple parmi d’autres sur le site du ministère de l’économie et des finances et je le reprends parce que j’ai vu aux infos des policiers qui manifestaient contre le 1 fonctionnaire sur deux non remplacé… Bref on diminue le nombre de policier mais « dans le cadre des programmes de la police nationale et de la gendarmerie on demande l’amélioration du taux d’élucidation des enquêtes. (et on fixe des objectifs chiffrés/mois) moins de policiers/ plus d’enquêtes élucidées…
Concernant les lycées cette réforme s’inscrit dans cette logique moins ou pas plus de moyen mais accroître les services rendus aux lycéens, notamment au niveau de l’orientation et de l’accompagnement. Par ex moins d’élèves qui redoublent en seconde, plus d’élèves qui réussissent dans le supérieur. Le contexte c’est ça : vous n’aurez pas plus mais vous allez faire mieux, on va rationaliser les moyens, viser l’efficacité et la rentabilité la plus absolue et pour y parvenir fixer des objectifs chiffrés, faire jouer la concurrence entre les bahuts entre les profs bref « tous les bienfaits d’une saine émulation » trop longtemps oubliée en France par rapport à d’autres pays et dont le système éducatif se prive à tort !!! (discours de sarkozy de juin 2008 à l’occasion du bicentenaire des recteurs) autre citation p.4/5 « Le défi de la qualité, c’est ensuite l’amélioration des performances scolaires globales …[cela] exige que l’éducation nationale entre résolument dans la culture de l’évaluation et du résultat. C’est absolument capital. C’est à vous dans chaque académie, dans chaque département, pour chaque filière pour chaque discipline, de promouvoir cette nouvelle façon de diriger l’école. C’est à vous sur le terrain, d’encourager les bonnes pratiques de récompenser les efforts de repérer les difficultés, de traquer les dysfonctionnement et de sanctionner les insuffisances. »

Une anxiété ambiante

Le contexte de chômage fait que les attentes des parents et des lycéens sont lourdes. C’est comme si dans le monde actuel, il ne fallait pas se rater, et surtout pas à l’école ! des attentes démesurées ? l’école peut-elle tout régler ?
C’est ce que Châtel semble nous dire avec sa réforme. « Je vous ai entendu, je vous ai compris » ! Grâce à cette réforme, les lycéens seront mieux orientés, on pourra se tromper de parcours et corriger la trajectoire, grâce à l’accompagnement personnalisé chaque élève bénéficiera d’ « acadomia » dans son lycée. Evidemment la promesse est alléchante et on comprend à juste titre que parents et lycéens soient séduits.
Voilà d’ailleurs comment les lycéens comprennent l’accompagnement personnalisé : on aura deux heures par semaine en petits groupes et on pourra avoir différents interlocuteurs pour nous accompagner dans nos problèmes ou difficultés. Ex. l’assistante sociale pour les pbs familiaux, le co-psy pour le projet d’orientation, le prof de français pour l’aide sco en français, le prof de math pour l’aide sco en math et toutes ces personnes interviendront à tour de rôle dans ces deux heures pour nous aider !
Mais qu’est-ce que cela va donner dans la réalité, dans la vraie vie de nos lycées ?

***

1 – Les grilles horaires (cf snes dijon et site national du snes)
En gros ON PERD DES HEURES

2 – L’accompagnement personnalisé :

Dans cette réforme la grande nouveauté va se trouver dans les emplois du temps avec « l’accompagnement personnalisé » qui apparaît comme une nouvelle « matière » que l’on peut qualifier de « fourre-tout » : aide scolaire (ancienne AI étendue à ttes les matières), aide à la méthodologie (enseignée de manière transversale), aide à l’orientation, activités multiples !
L’élève va avoir deux heures d’accompagnement personnalisé dans la semaine et un prof désormais pourrait avoir : 14 h de français et 4h d’accomp pers / ou un prof de SES (qui refusera d’aller enseigner sa matière sur différents bahuts) : 12h de SES et 6h d’accompagnement personnalisé.

Que faut-il bien dire aux parents et aux lycéens ?

1 / les lycéens n’auront pas devant eux différents interlocuteurs tous mieux placés les uns que les autres pour régler leur différents pbs. C’est le prof qui va prendre en charge ces 2 heures ! le prof va donc faire plus de tâches mais moins bien parce qu’il va se retrouver à faire des tâches pour lesquelles il n’est pas formé ! (orientation/aide sco probablement dans des matières autres que la sienne…)

2 / Cet enseignement ne pourra pas se faire en petits groupes (6 ou 8 par exemple) sans que cela soit au détriment des enseignements disciplinaires. (cf p.13 diaporama chefs d’établissements)
 si on privilégie les dédoublements matières, on fait de l’accomp personnalisé à 16 ou 17 élèves (on est loin d’acadomia !) et ça sera « pisser dans un violon » c’est le cas de figure dans le tableau p.13
 si on privilégie les dédoublements pour l’accompagnement personnalisé (groupes de 6 ou 8) on diminue considérablement les heures pour des dédoublements par matière /

Quelque soit le choix fait, il ne pourra être qu’au détriment des élèves.

belles bagarres en perspectives ds les salles des profs !(cf affiche la zizanie)

Il y a là pour moi qqch de honteux et d’inacceptable, nous allons nous étriper pour qqch qui de toute façon ne sera pas satisfaisant ! et nous allons l’organiser nous mêmes ! IL FAUT REFUSER çA !

2 – l’orientation

Tous les rapports, tous les discours sur la réforme des lycées (depuis 2008) nous disent qu’elle va être au centre du système éducatif. « colonne vertébrale pour Descoings » et Sarkozy dans son discours du 13 octobre promet une « véritable révolution » au niveau de l’orientation. Chaque élève aura le droit à l’erreur, chaque élève pourra trouver la voie qui va lui permettre de réussir, réorientation à tous les étages !

le projet d’orientation des élèves va reposer sur le dos des enseignants ! mercredi stage avec les CO-PSY qui sentent bien que leurs missions sont entrain de changer. Ils craignent de perdre le cœur de leur métier à savoir élaborer sur la durée un projet avec les élèves qui sont des êtres « en devenir ». tâche complexe, un élève peut avoir en début de seconde le souhait de faire coiffure mais cela peut ne pas être son désir profond et son projet peut évoluer ou changer. Cela demande de la maturation et du temps. Formation à psychologie, qqch d’essentiel / or ce qui risque d’arriver c’est que le prof va faire de l’orientation à partir de fiches ONISEP, et dire alors pour les métiers médicaux, voilà ce qui existe, pour les métiers du tourisme, voilà ce qui existe… un travail désincarné qui est finalement ce que les co-psy font en dernier. (co-psy craignent de ne travailler qu’avec adultes, plateformes, formation d’enseignants rapide…)

les stages passerelles risquent de se faire à sens unique, vers le bas. Avec tronc commun en première, un élève de S pourra se réorienter en première L mais l’inverse ne sera pas possible (pas de math dans le tronc commun – 15 jours ne suffiront pas pour rattraper un trimestre !)

les stages de réorientation risque de devenir des voies de sortie pour les élèves les plus en difficulté à qui on va dire, vous avez essayé une première générale au premier trimestre ça va pas, remise à niveau, première techno ensuite, ça va pas ! allez en apprentissage ! (parler à ce moment du plan agir pour la jeunesse de Martin Hirsh / les décrocheurs ne sont plus suivis par l’école mais on leur propose des stages en entreprise, des contrats, on leur propose le financement du permis de conduire ! et hop on ne vas pas chercher à les instruire plus mais à les diriger au plus vite vers le monde du travail ! honteux !on sait que dans les missions locales où on a aussi des objectifs chiffrés à remplir, on cherche désespérement des décrocheurs à qui on pourrait offrir le permis de conduire !)) une forme de démission de l’école, du lycée qui va garantir l’excellence aux meilleurs(lesquels n’auront pas besoin de stages pdt les vacances, orientation facile) et une voie d’évacuation rapide pour ceux qui ont du mal (ceux qui auraient le plus besoin de temps pour s’adapter au lycée vont être amenés à le quitter plus vite et sans diplôme !)

CONCLUSION

Cette réforme est un miroir aux alouettes. Le système ne peut que profiter aux meilleurs et enfoncer encore davantage les élèves en difficulté. Or il faudrait élever le niveau de tous (vital pour le dynamisme d’une société). Vital aussi pour affronter la vie !
80 % au bac et pas seulement 50% de ceux qui sont au lycée qui réussissent dans le supérieur

Ce n’est pas ce que vise la réforme Châtel : Je m’avance peut-être en tout cas c’est ce que je crois, mais il me semble que si ce que vise Châtel passe, le Lycée changera profondément de nature. Son rôle ne sera plus de construire une culture commune sanctionnée par l’obtention du BAC, mais de faire fonctionner le lycée comme une gare de triage orientant les « meilleurs » vers le Supérieur. En effet les classes de seconde et de première auraient pour office d’orienter vers la classe de terminale ou d’organiser des sortie « courtes » vers le monde du travail à l’issue de la première. La classe de terminale, et cela est très clair dans les textes, serait conçue comme la première marche vers le Supérieur (intervention de profs du Sup prévues etc…)
Les classes de terminales pousseraient jusqu’au bout l’hyper spécialisation des filières : un signe, l’abandon de certaines matières faisant partie, jusqu’à maintenant, du tronc commun (en effet pourquoi s’embarrasser d’heures d’histoire en terminal S puisque cette matière disparaît dans toutes les formations universitaires post-BAC (sauf en prépa et on voit bien à quels élèves « d’élite » on conseillera de prendre histoire en option…). Mais on peut faire la réciproque en L : pourquoi s’embarrasser des maths puisque etc…
C’est toute l’économie éducative du lycée qui explose. La terminale échappera en partie au lycée que nous connaissons, ce qui revient à dire que le lycée que nous connaissons, LE LYCEE POUR TOUS, se terminera par le classe de première avec l’instauration d’une sorte de sas, de barrage, de numerus clausus entre la première et la terminale.
Alors, c’est peut-être dans cette logique que nous aurons intérêt à décrypter les annonces qui nous serons faites sur le futur BAC et notamment la possibilité de sanctionner un certain nombre de savoirs du tronc commun en fin de première par le moyen du contrôle continu.

Alors oui, cette réforme

ne va pas casser la hiérarchie des filières ni les rééquilibrer.
Une réforme qui va faire que les enseignants vont faire plus mais au détriment de la qualité et de ce qu’ils savent faire formation dans leurs disciplines.
Un savoir appauvri pour tous ? l’école ne servirait-elle qu’à orienter dans le monde du travail ?
Une réforme qui fait des économies au détriments des plus fragiles de nos élèves.
Une réforme qui appauvrit les enseignements disciplinaires (cf. enseignements d’exploration 2 fois 1h30 !) pour histoire en terminale je l’ai évoqué, mais aussi pour SES dont l’enseignement changera profondément de nature

Une vision de l’école qui institutionnalise la concurrence entre les profs, entre les établissements comme garant de réussite (cf sarko « la saine émulation »)
Développement des enseignements (à l’image des langues) en groupes de compétence. Vision extrêmement normative des enseignements) repérer les bonnes pratiques (conseil pégago) et étendre à tout le monde. D’où uniformisation des pratiques !!! à quand les écrans dans les classes pour remplacer les profs, comme si le savoir c’était pas qqch qui se contruisait dans la classe !!!

Ce que nous défendons et fort :

80 % d’élèves au bac (démocratisation réelle du lycée)
lutter contre l’échec scolaire ça se passe déjà dans la classe, effectifs raisonnables, heures pour des dédoublements, heures de concertations inscrits dans l’emploi du temps entre les différents intervenants de l’école (infirmière, co-psy, prof, assistante sociale…)
garantir à tous les élèves une formation la plus égale possible pour tous (incompatible avec autonomie des établissements)

Si cette réforme passe posons nous deux questions :

A quoi va ressembler le lycée ?
A quoi va ressembler le métier de prof ?