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Lycées : une belle réforme pour Noël ?

Par William Exertier

paru le mardi 15 décembre 2009

Il est vrai que cette année le papier cadeau est particulièrement soigné : le gouvernement ne renouvelle pas les erreurs de 2008 en matière de communication sur ce dossier ; il annonce fièrement que la réforme permettra à un élève de corriger ses choix d’orientation au cours de son année de première, d’obtenir du soutien personnalisé dans les matières où il rencontre des difficultés ou pour son orientation ... le discours est alléchant.

Mais la réalité risque d’être bien différente. En effet :

âž » La mise en place d’un tronc commun en première générale (15 h) pour permettre aux élèves de changer de séries va aussi permettre de les regrouper dans des classes à 35 contre 26 en moyenne cette année dans notre académie. Ne faudrait-il pas à l’inverse améliorer les conditions de travail des élèves ?

âž » Les nouvelles grilles horaires du cycle terminal font apparaître :
- en série L, la disparition des maths obligatoires, la baisse des horaires de français et de langues vivantes ;
- en série ES, la suppression de la « science politique » en première et la baisse des heures de SES ;
- en série S, la baisse des heures de maths et de sciences et la suppression de l’histoire-géographie en terminale ;
- un nombre global d’heures de cours et de dédoublements différents selon les séries (dans l’ordre décroissant : S ; ES ; L)

De plus, les stages passerelles d’une ou deux semaines pendant les vacances sont censés permettre à un élève voulant passer de la série L à la série S de rattraper 10 heures hebdomadaires de cours de maths et de sciences ou à un élève voulant passer de la série S à la série L de rattraper 4 heures/semaine de cours de littérature.

Est-il raisonnable de penser qu’un élève pourra rattraper autant d’heures de cours pendant les vacances scolaires ?

N’y a-t-il pas un risque de voir des passages s’effectuer uniquement des séries S ou ES vers la série L et de voir ainsi la hiérarchie des séries se renforcer ?

âž » Les établissements auront localement la responsabilité d’organiser les enseignements en groupes à effectifs réduits et l’accompagnement personnalisé. La rentrée 2010 se préparant entre les mois de février et juillet 2010, est-il raisonnable de décider des enseignements qui seront dédoublés et de l’organisation de l’accompagnement personnalisé avant de connaître les élèves qui seront concernés par ces dispositifs ?

Les modalités retenues correspondront elles réellement aux besoins des élèves ?

Un établissement qui voudra conserver des enseignements dédoublés (pour les séances de travaux pratiques ou les séances informatiques) devra proposer aux élèves deux heures d’accompagnement personnalisé dans des groupes dont l’effectif variera entre 10 et 18 élèves.

Peut-on parler dans ces conditions d’un accompagnement personnalisé ?

âž » La réforme prévoit que les enseignants aident l’élève à élaborer son projet d’orientation pendant les heures d’accompagnement personnalisé et/ou dans le cadre du tutorat. Parallèlement, le nombre de Conseillers d’Orientation Psychologues diminue fortement (5 départs à la retraite sur 6 non remplacés).

Les élèves seront-ils mieux orientés par des enseignants, dont ce n’est pas le coeur de métier, que par des personnels qualifiés, formés pour tenir compte de la psychologie de l’élève ?

Toutes ces craintes (et ce ne sont là que quelques exemples) sont perçues essentiellement par les personnels de l’éducation qui connaissent bien les rouages du système éducatif ; en effet, la vitesse [1] à laquelle avance le Ministre sur ce dossier ne laisse pas le temps aux parents, aux élèves et aux collègues de bien comprendre comment va se mettre en place cette réforme. Nous avons donc un rôle essentiel à tenir en exposant nos craintes à la « communauté éducative » [2]. Cela a déjà été le cas dans certains Conseils d’Administration au mois de décembre ; les motions présentées par les personnels ont d’ailleurs obtenu le soutien d’un grand nombre de parents et d’élèves, mais ce n’est pas suffisant : il faut continuer à informer collègues, parents, élèves en distribuant des tracts, en réunissant des assemblées générales, en créant des collectifs, en investissant les deux demi-journées banalisées accordées à chaque établissement par le Ministre de l’Education nationale afin de « permettre à la communauté éducative de s’approprier la réforme » [3]. Sur ce dernier point, il faudra être vigilant en demandant que ces deux demi-journées soient organisées au début de l’année 2010 et surtout en s’assurant que l’organisation retenue par l’administration nous permette d’exposer nos craintes ; certains chefs d’établissement seront tentés d’appliquer à la lettre les recommandations de leur Ministre, à savoir : vendre la réforme.

Tout ceci demande, une fois encore, beaucoup d’efforts. Pour vous aider dans vos actions, de nombreux tracts et motions sont disponibles en ligne sur les sites internet du S4, du S3 et dans la rubrique En direct des S1 de nos pages départementales.

Il est encore temps d’agir, la rentrée 2010 se prépare entre janvier et juillet 2010.

Fédération Syndicale Unitaire

Notes

[1La réforme du lycée a été présentée officiellement le 19 novembre dernier et a été soumise au Conseil Supérieur de l’Education le 10 décembre ; sa mise en place est prévue à la rentrée 2010 pour les classes de seconde.

[2Extrait de la lettre que Luc Chatel a envoyée aux chefs d’établissement le 30 novembre dernier.

[3Extrait de la lettre que Luc Chatel a envoyée aux chefs d’établissement le 30 novembre dernier.